Quel rapport entre la « réification » et l’Hypnose Humaniste » ?

« Réifier » est le verbe qui désigne le fait de « donner les caractéristiques ou transformer en chose ce qui ne l’est pas ». A l’origine, c’est un terme psychiatrique pour les personnes qui ont perdu l’empathie envers les autres êtres vivants. On parle aussi de « chosification » : comme un politicien qui dit « la population » (réification) au lieu de « les gens qui peuplent le pays » (des êtres pensants et sensibles). Il est plus facile, émotionnellement parlant, pour le politicien, de contraindre une chose (la « population ») plutôt que de vraies personnes…
A l’extrême, un psychopathe « réifie » / « chosifie » les gens qu’il côtoie. Il ne les prend plus que comme des objets, dont il peut abuser sans états d’âme (sauf que pour le psychopathe, c’est une maladie, il ne l’a pas fait exprès, pour se déculpabiliser).

« Réifier » peut donc aussi être le fait de considérer une idée abstraite ou une émotion comme un élément concret : leur donner un caractère statique ou figé (donc modifiable, pour l’utilisation en thérapie). Par exemple, une personne qui se sent oppressée dira que « ça lui pèse ». Et si on lui demande de préciser, peut-être décrira-t-elle ce poids (émotionnel) comme « une plaque métallique, épaisse et sombre », posée sur sa poitrine.

Effectivement, la « Thérapie Symbolique Simple » (TSS), qui est la technique principale en Hypnose Humaniste, consiste, comme son nom l’indique, à agir sur une émotion à laquelle on aura donné une forme, donc un symbole.
Il est facile, n’ayant pas compris la particularité du travail en « état de conscience augmenté », de copier simplement cette technique pour la reproduire de manière dissociée… Malheureusement, cela se fera alors à un tout autre niveau d’intervention, et donc avec un impact bien différent de celui que l’on vise en HH… et on sera incapable de reproduire ce qui est atteint en HH.

Malheureusement aussi, « parce que c’est la mode » et par ignorance ou simplification, bon nombre de « gourous » actuels en Hypnose plagient les techniques HH pour les incorporer à leurs propres cours… mais en hypnose « habituelle », donc dissociée… donc complètement à côté de ce que l’on fait véritablement en HH, en Conscience augmentée.

Réification vs travail en conscience
D’après la personne qui cherche à populariser le terme « réification », ce serait « une technique d’hypnose bien connue » mais, bizarrement, il est impossible d’en trouver la trace dans les livres d’hypnose, de son origine à nos jours, éricksoniens ou classiques…
Quoi qu’il en soit, il s’agirait de transformer une pensée, une émotion ou un ressenti corporel en un objet imaginaire, sur lequel la personne pourra ensuite agir.

Voyant quelques dates : la première trace d’une « réification » en tant que technique thérapeutique se trouve dans un article sur l’auto-hypnose qui date de 2000. La TSS était alors déjà enseignée depuis 5 ans à l’IFHE et le protocole figurait dans le livre « Hypnose » sorti également en 2000…
2006 voit la publication du livre « Hypnose Humaniste », qui décrit un protocole avancé de la TSS… Et l’on retrouve certaines étapes de ces protocoles dans un autre article de 2009 – lequel article (et c’est le seul) est repris partout où l’on parle de « réification ».

Que  ce soit une réelle technique d’hypnose, peu courante, et qui a la faveur de certains, ou que cela soit un énième détournement des techniques HH, peu importe… car il ne s’agit pas du tout de ce que l’on fait en Hypnose Humaniste, pour la simple et bonne raison qu’en HH on travaille sur le « champ d’information » et pas sur un symbole (objet imaginaire) issu de l’Inconscient – ce qui explique la grande différence d’effet entre les deux pratiques.

# En Hypnose Ericksonienne (en réalité, il s’agit de « Nouvelle Hypnose », car Erickson n’a jamais fait symboliser / « réifier » quoi que ce soit à ses patients – en tous cas, il n’y a aucune trace de cette pratique dans ses livres et les nombreux cas publiés par Erickson), on fait symboliser par exemple sa douleur au patient… (qui est en hypnose)… et on lui demande ou on suggère de modifier ce symbole, comme dans une métaphore. Cela fonctionne très bien, et cela existe depuis toujours en Hypnose Classique. On appelle cela un « travail métaphorique » et c’est effectivement courant pour produire une analgésie (diminuer ou supprimer la douleur). On agit sur la perception du cerveau, ici de la douleur. C’est très efficace… mais… 1/ ce n’est pas du tout ce que l’on fait en Hypnose Humaniste et 2/ cela prend « un certain temps » pour être efficace… Attention, c’est tout de même rapide, mais il y a un temps nécessaire : par exemple quelques dizaines de secondes ou quelques minutes… et, il peut y avoir de la résistance ou le besoin de répéter la technique.

# En Hypnose Humaniste, on amène la personne en « état de conscience augmentée », donc au plus proche de sa Conscience, qui est considérée comme un champ d’informations, au sens physique (c’est-à-dire « tel qu’expliqué par la science Physique »).
La personne se met donc à percevoir son propre « champ d’informations », qui est bien trop immense pour son cerveau, qui « résume » donc sa perception par une « image » : un symbole (objet imaginaire, si vous voulez : mais en HH, ce symbole est considéré comme la perception d’un champ réel, donc pas « imaginaire » au sens de « sans réalité »). Le symbole est le « masque » d’une réalité plus vaste, le champ d’informations à l’origine de ce qui arrive à la personne – dans notre exemple, sa douleur.
La personne dissociée, en Hypnose Ericksonienne, perçoit sa douleur comme une brulure, un feu, une lame, un objet agressif (bords pointus par exemple)… C’est l’expression de ses émotions, de son ressenti (donc seulement des choses organiques, psychologiques).
Alors qu’en HypnoseHumaniste, la personne associée, en conscience, va percevoir le champ d’informations qui fabrique le ressenti (émotion ou ici la douleur). Elle perçoit donc le « moule » qui donne forme (souvenez-vous : « information » = « informare » en latin : « ce qui donne forme »). On appelle cela le « maître-symbole » : le moule a l’origine du vécu de la personne. Nous ne sommes plus du tout au niveau de l’Inconscient !

Comment savoir si on agit au niveau informationnel et non inconscient / physique ?
L’effet est immédiat, il n’y a aucun délai.

# En Hypnose Ericksonienne : je visualise mon symbole (j’ai « réifié » ma douleur par exemple, ou mon émotion)… je choisis quoi en faire… (là, j’ai toujours mal)… donc je fais ce que j’ai choisi de faire… (cela peut prendre un petit moment)… et au final, ma douleur (ou mon émotion) s’apaise.

# En Hypnose Humaniste : comme je suis en « état de conscience augmenté », ce que je perçois n’est pas mon symbole (issu de mes ressentis, émotions, perception, etc. donc quelque chose qui provient de mon être profond : mon corps, mon Inconscient), c’est le maître-symbole. Le moule à l’origine de mon ressenti. Cela peut avoir la même forme que mon symbole inconscient, mais en plus fondateur / originel, puisqu’il en est la source (comme le moule a la même forme que le gâteau)…
Là, j’ai l’idée de ce que je veux faire… et… oh surprise !!!… Je n’ai plus rien : la douleur (ou l’émotion) est partie !!! L’idée de la chose réalisée suffit, elle s’est accomplie d’elle-même, sans latence (aucun temps d’attente). Car « l’idée » (idea, en grec, signifie… « ce qui donne forme ») est similaire à « informare » en latin (information). Ce que votre Conscience conçoit, elle le réalise (« rend réel »), instantanément… si vous êtes en état de conscience augmenté, donc « associé ».

Voilà ce qu’est la « Thérapie Symbolique simple » en Hypnose Humaniste.
Il y a bien une étape qui pourrait être considérée comme de la « réification » (la mise en forme d’une émotion), tout au début du protocole, mais tout le reste n’a plus rien à voir, ne serait-ce que le niveau d’intervention informationnel
(inconnu en Hypnose Ericksonienne).

Autre différence (et non des moindres  !)
Il n’y a plus de résistance : l’homéostasie, la faculté d’un organisme à préserver son équilibre, même si celui-ci est négatif… et que certains psys qualifient de « résistance »… Puisque cette « résistance » provient du fait de « changer le gâteau » (action sur l’Inconscient) sans avoir modifié le « moule » : le champ d’information, ce qui « donne la forme » et donc à l’origine de l’homéostasie.
Vous arrondissez un triangle car ses pointes vous blessent ? Mais demain, le triangle est revenu, aussi pointu qu’avant… car le « moule » (informationnel) n’a pas changé : le moule a redonné sa forme au gâteau… Il faut donc refaire et refaire la technique, pour que l’information « remonte » (biofeed-back) et modifie le « moule ». La nature fait cela tout le temps, c’est normal… mais… cela prend du temps, inutile si on travaille au niveau « qui donne la forme » (informationnel / le moule) !

# En Hypnose Humaniste, vous arrondissez directement le « moule », le « gâteau » change donc instantanément (puisque son moule est différent) et il reste ainsi (puisque son moule a été changé)… C’est tout simple, zéro « homéostasie », zéro résistance… Mais… il faut faire tout cela au niveau informationnel, qui est inaccessible au thérapeute (à moins qu’il ne se prenne pour Mme Irma, avec des pouvoirs de voyance :-))
Donc, il faut permettre à la personne de modifier son propre champ, car elle seule peut le faire… Impossible de faire cela en état d’hypnose ordinaire, dissociée, où c’est le thérapeute qui dirige et où le patient est plongé dans son Inconscient: tout le contraire de ce qu’on veut en HH !… Donc, « état de conscience augmenté » obligatoire.

On ne peut donc pas faire de « thérapie symbolique », au niveau où on le fait en Hypnose Humaniste (sur l’information, la source, le maître-symbole) en dissocié.
Le travail symbolique existe sûrement depuis toujours en thérapie : j’ai une migraine, ça me fait comme un étau, je desserre l’étau, je vais mieux… Mais ce n’est pas ce que l’on fait en HH : j’ai une migraine, je trouve la source informationnelle de la migraine, je la transforme ou la retire. La différence est qu’en validant le fait que j’ai un « étau », je confirme cet étau (la preuve, ça m’a fait du bien quand je l’ai desserré, donc il existe vraiment !) et j’aurais donc des migraines toute ma vie (mais je saurais les soulager, en desserrant mon « étau » !)… Alors qu’en HH, vous n’aurez plus de migraines, du tout.

Voilà :)